Portrait de Zacharias Amara
16 juillet 2024
L’Institut universitaire de France, rattaché au ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, est un vivier d'enseignants-chercheurs sélectionnés par un jury international pour la qualité exceptionnelle de leurs recherches. Lorsqu’ils en deviennent membres, ils bénéficient d’une part, d’une dispense de leurs charges d'enseignement, et d’autre part, d'une prime et d'une dotation budgétaire pour mener à bien leurs travaux tout en restant en poste dans leur établissement.
Zacharias Amara : lauréat au titre de la chaire fondamentale
Zacharias Amara, tout comme Justin Dirrenberger, maître de conférences HDR au Cnam et lauréat au titre de la chaire innovation, a été nommé membre junior de l’IUF le 22 mai dernier.
Passionné de chimie organique, et plus particulièrement de photochimie*, Zacharias Amara est spécialiste de l’étude des interactions lumière-matière pour le développement de procédés plus respectueux de l’environnement. L’objectif de ses recherches est de mimer les processus photosynthétiques afin de produire des molécules d’intérêts sociétaux de manière plus vertueuse.
À son arrivée au Cnam, Zacharias initie un programme de recherche sur la conception de nouveaux photocatalyseurs** plus performants et plus éco-compatibles. Par la suite, il s’intéresse au développement de procédés de synthèse utilisant la lumière infrarouge, jusqu’alors considérée comme une énergie trop faible pour activer des réactions chimiques. Ces développements lui permettent d’appliquer les technologies d’activation photochimique à la synthèse de molécules à hautes valeurs ajoutées telles que l’artémisinine, un des traitements les plus efficaces connus à ce jour contre la malaria. Il travaille également en étroite collaboration avec une jeune entreprise innovante française (PILI) pour la modification de colorants biosourcés par voie photochimique. L’année dernière, il cofonde la startup Linium Biochemicals qui vise à utiliser la lumière pour valoriser la lignine***, un biodéchet de l’industrie du papier.
Au fil de sa carrière, Zacharias a obtenu des financements prestigieux tels qu’une bourse de recherche de la Fondation Bill & Melinda Gates, ainsi que deux financements de l’Agence nationale de la recherche : le premier concerne le programme « jeune chercheur », le second un projet recherche collaborative avec la société PILI et le laboratoire de chimie théorique de Chimie ParisTech. Il a également été lauréat de programmes de collaborations internationales avec l’université McGill au Canada et, plus récemment, avec l’université de Rio de Janeiro. Ses travaux ont été récompensés par la Green Chemistry Institute de l'American Chemical Society ainsi que par la division de chimie organique de la Société chimique de France (Prix Jean-Normant récompensant un jeune enseignant-chercheur), où il siège par ailleurs comme membre du conseil d’administration.
Autres dates importantes
Zacharias Amara est lauréat de la faculté de pharmacie de l’université Paris-Sud en 2008 et obtient son doctorat de chimie organique en 2012 au sein de cette même université. Il part ensuite au Royaume-Uni pour mener des recherches postdoctorales en chimie verte à l'Université de Nottingham. En 2015, il revient à Paris et effectue un second stage postdoctoral à l'ESPCI ParisTech. Ces expériences lui permettent de nouer des liens avec des chimistes renommés et de débuter en janvier 2016 sa carrière de maître de conférences au Cnam où il obtient son habilitation à diriger les recherches en 2022. En 2024, il est élu responsable de l’équipe chimie moléculaire du laboratoire Génomique, bio-informatique et chimie moléculaire du Conservatoire.
*Étude de l'action de la lumière ou de toute énergie rayonnante (rayons X ou particules nucléaires) sur les réactions chimiques.
**Catalyseurs activés par la lumière.
***L’un des principaux composants du bois.
3 QUESTIONS À ZACHARIAS AMARA, MAÎTRE DE CONFÉRENCES HDR EN CHIMIE AU CNAM ET MEMBRE JUNIOR DE L’INSTITUT UNIVERSITAIRE DE FRANCE
Pourquoi avoir candidaté à l’IUF et quelle a été votre réaction quand vous avez appris la bonne nouvelle ?
L’IUF est une institution prestigieuse qui donne l’opportunité à des enseignants-chercheurs de se consacrer pendant un temps relativement long au développement d’un projet de recherche ambitieux. C’est une occasion unique qui nous permet de prendre des risques et de sortir de notre zone de confort. À ce titre, je m’intéresse depuis quelques temps, d’abord par simple curiosité puis avec des idées plus concrètes, aux phénomènes d’interactions entre les états photoexcités de la matière et les champs magnétiques. Il s’agit d’un sujet passionnant et très peu exploré dans mon domaine d’application qui est la chimie organique. Ces interactions sont principalement étudiés par les biophysiciens qui tentent d’expliquer les migrations des oiseaux du Nord au Sud suivant le champ magnétique terrestre. Aussi étrange que cela puisse paraître, il semblerait que ces interactions puissent avoir un effet dans les réactions photochimiques que nous explorons au laboratoire, et j’ai pris le pari que le « photomagnétisme » permettrait de réaliser des transformations jusqu’alors prédites comme impossibles. Je suis donc très heureux de cette nomination, car cela me donne des moyens pour explorer quelque chose de totalement nouveau.
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Quels sont vos objectifs en termes de recherche pour les cinq ans à venir ?
Mon objectif est d’abord de mettre au point un modèle d’étude puis à terme de développer des procédés photomagnétiques dans lesquels les composants seront capables d’accumuler une grande quantité d’énergie. Ceci peut avoir un impact considérable, et les applications seraient donc nombreuses. Je souhaite utiliser ce temps dédié à la recherche pour répondre à des appels à projet européens et nouer des partenariats avec des experts en France et à l’étranger. J’ai du pain sur la planche, car il y a beaucoup d’autres projets en cours au laboratoire qu’il faut mener de front. Cependant, tous ces projets semblent s’imbriquer de manière assez complémentaire et notre équipe a la chance d’évoluer depuis peu dans de nouveaux laboratoires du Cnam à Saint-Denis, qui offrent un cadre de travail performant et très agréable. Je suis convaincu que ceci contribuera à augmenter notre compétitivité et notre attractivité au niveau national et international, mais également de nouer de nouveaux partenariats industriels et académiques.
Enseigner et transmettre ne vont-ils pas vous manquer pendant cette période ?
J’ai toujours aimé enseigner, c’est ce qui m’a poussé à postuler sur ce poste de maître de conférences en 2016. En étant nominé à l’IUF, je ne quitte pas totalement mon rôle d’enseignant puisque je vais continuer à assurer un tiers de mon service. Cette situation est plus propice au démarrage de nouveaux projets dans lesquels il y a une grande prise de risque. Par ailleurs, même si je suis déchargé d’une grande partie de mon service d’enseignement, j’ai également une implication dans des formations avec Cnam Entreprises qui fonctionnent bien et j’ai récemment pris de nouvelles responsabilités au laboratoire, donc je ne risque pas de m’ennuyer ces prochaines années !
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