Automobile et pollution

Lorsque l’on parle de transports terrestres du futur au sens large, il vient rapidement à l’esprit ces véhicules amphibies, volants, ou encore pouvant se conduire seuls et pouvant fonctionner avec d’autres sources d’énergie que le pétrole ; un peu à la manière de la célèbre DeLorean DC-12 (Figure 1) dans la trilogie Retour vers le futur par exemple. Toutefois, même si ces caractéristiques seraient très intéressantes à développer, l’actualité et les récentes prises de conscience concernant l’impact humain sur le réchauffement planétaire font qu’il semble plus approprié d’appréhender la question du transport du futur du point de vue énergétique et impact écologique.


 
Figure 1: Illustration extraite de Retour vers le Futur II


C’est donc dans cet état d’esprit qu’un tour d’horizon des sources d’énergie, mais surtout des motorisations de véhicules terrestres sera effectué ; notamment pour corriger certaines idées préconçues dues principalement aux raccourcis ou erreurs énoncés dans certains médias, promotions de produits grâce aux publicités ou autres discours politiques.

Entre diesel et essence, tout est une question d'injection !

L’actualité relaie de manière quasi quotidienne des problèmes de pollutions urbaines atmosphériques avec des pics d’ozone, des risques liés aux particules fines, sans compter le réchauffement global de notre planète. Les principaux responsables désignés étant alors les véhicules avec des moteurs à allumage par compression, plus communément appelés Diesel. Il est crucial de rappeler que cette assimilation apparemment évidente entre véhicule Diesel et émissions de particules et NOX provient de l’image vieillotte du fameux nuage noir sortant du pot d’échappement lors de fortes charges moteurs et accélérations. Cependant il est très rarement expliqué d’où provient ce phénomène, mais surtout la très grande majorité du temps il est caché que les véhicules dits essence à injection directe connaissent le même problème : les émissions de particules et de NOX sont liées à la technologie employée qui affecte aussi bien les véhicules Diesel que ceux à injection directe Essence.



Figure 2: Evolution des méthodes d'injection d'essence
Source : www.car-engineer.com



Figure 3: Moteur Diesel, injection indirecte a) et directe b)

Le système d’injection directe de carburant dans la chambre de combustion est très répandu de nos jours. Il apporte une économie de carburant en injectant le carburant uniquement aux endroits où la combustion aura une efficacité maximale. Dans la pratique, l’économie ne se produira que lorsque le moteur sera en charge partielle. Toutefois, les moteurs à injection directe produisent tous des particules, puisque le carburant n’a pas le temps de s’évaporer convenablement et ne va donc brûler que partiellement. De plus, la combustion du jet pour les moteurs Diesel comme des stratifications pour les véhicules Essences causent des zones de réaction aux températures locales élevées, favorisant la formation de NOX.
Bien que les normes de pollutions soient en constante évolution, l’extrait des normes Euro proposé ici en Tableau 1 permet de bien comprendre deux choses. La première est qu’un moteur thermique est complexe dans son fonctionnement tout comme dans ses émissions polluantes. La seconde étant que les normes et règlementations reconnaissent et autorisent que des véhicules Essence rejettent des NOX comme les Diesel, et même plus de particules fines (PN). Tolérance de 6.1012 jusqu’en 2017.


   


Tableau 1: Extrait de valeurs d'émissions polluantes

Le véhicule électrique serait-il alors le bon choix ?

Se présente alors le choix du véhicule totalement électrique. Bien qu’historiquement le premier véhicule à franchir les 100 km/h soit électrique (en 1899), c’est pour son caractère « zéro émission », « propre » ou « écologique » qu’il suscite tant d’engouement. En effet, les deux avantages indéniables sont : un non rejet de polluants localement et une très bonne efficacité dans la conversion d’énergie. Cependant, hormis le manque d’autonomie des véhicules électriques, leur construction et fonctionnement ne sont pas sans conséquences et impactent la planète, puisque l’extraction et le traitement du Lithium et composants des batteries requièrent des ressources énergétiques importantes. De plus, pour des questions de coûts et de techniques, le recyclage de ce type de batteries est pour ainsi dire inexistant.
Il sera ajouté que l’électricité se stocke très mal, un exemple quotidien est celui de batterie se déchargeant même sans utilisation. L’électricité n’est qu’un vecteur énergétique, il permet uniquement de transporter de l’énergie d’une source à un outil/système spécifique. Sachant cela, se pose la question de la production de l’électricité utilisée. En effet, lorsque l’on regarde le cas particulier de la France où environ 77% de l’électricité produite en 2014 provenait du nucléaire, à l’échelle mondiale (en 2013) se sont presque 70% qui provenait de centrales à énergies fossiles où le charbon a toujours une place de choix (Figure 4). Ainsi, mis à part le problème des risques et dangers liés au nucléaire associés aux questions du traitement des déchets et du démantèlement total des centrales nucléaires toujours impossible de nos jours, il apparait alors clairement que l’emploi de véhicules électriques dans le monde n’a pour unique avantage que de délocaliser la pollution et aucunement de la réduire : les grandes agglomérations ne souffriraient plus des particules et autres pollutions liées au transport mais du point de vue global planétaire, l’impact resterait inchangé. Il faudrait alors compenser l’énergie utilisée par les véhicules thermiques par de la production d’électricité et de batteries.
 
 
Figure 4: Production électrique mondiale a) et en France b)

Quelles solutions pour demain ?

Ces quelques paragraphes ont mis en évidence qu’une grande retenue face aux raccourcis et aux discours orientés de publicités et politiques est de rigueur. Il faut garder un esprit critique sur les thèmes des voitures électriques « zéro émission » et voitures Diesel polluantes du fait des particules et NOX en comparaison avec les voitures Essences. Sous couvert d’écologie, ceci ne cacherait-il pas plutôt une volonté de forcer un renouvellement du parc automobile et donc une relance des ventes ?
Le véhicule du futur, du point de vue énergétique ne peut pas être uniquement électrique, Diesel ou à Essence comme on peut les connaitre. Un effort technique est nécessaire, de même qu’une information plus juste afin que chacun puisse appréhender l’impact réel des technologies proposées. Il appartiendra alors à chaque individu de choisir et agir en toute connaissance de cause.
C’est parce que presque tout ce qui nous entoure est énergie ou tout du moins peut être potentiellement une source d’énergie, qu’il apparait que le vrai défi est d’être capable de savoir comment l’exploiter. Pour cela, seront explicitées dans la partie suivante d’autres sources d’énergie et motorisations plus méconnues (Énergies et motorisations du futur). Mais pour ce faire, il sera crucial de corriger certains abus de langages et recentrer certaines idées vis-à-vis de l’énergie.
Nicolas-Ivan Hatat (auteur), docteur, École centrale de Nantes
Amélie Danlos et Christelle Périlhon (co-auteures), maitres de conférences au Cnam

Article en PDF